La tatouée du hammam

Article : La tatouée du hammam
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11/08/2014

La tatouée du hammam

Bon oui c’est l’été, il fait chaud et tout là, on arrive pas à marcher dans la rue, on sue, c’est dégeu. Bah voilà, raison de plus pour aller au hammam.

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OUI je suis folle. Mais le truc c’est que là, quand tu sors de la « salle de bain » à 50°C + eau chaude + vapeur, du coup les 40°c extérieur c’est du petit lait et tu as frais !

Alors moi j’ai décidé d’avoir frais, parce que le pauvre ventilateur chez moi il pouvait rien faire de plus que tourner sur lui-même.

J’ai pris mon sac, j’y ai foutu savon, gant de toilette, serviette, fouta dedans. J’ai enfilé un maillot, j’ai pris ma pudeur et je l’ai balancé au fond du placard et je me suis préparée mentalement à aller au combat.

Non parce que le hammam c’est un combat.

D’abord : tu dois trouver un put**n de hammam où entrer et là on dirait que toutes les femmes de Tunisie ont eu la même idée que toi le même jour.

Ensuite quand tu entres tu dois dealer avec les oeillades de tigresses. Ça va des oeillades des clientes aux oeillades des employées. C’est comme si tu étais un petit animal qu’elles voulaient désosser.

Et c’est pas drôle.

Bon par contre moi je dépense l’argent qu’on me donne dans du haut de gamme. J’ai arrêté les hammam populo. J’ai grandi. Maintenant je vais dans les salons de « beauté ».

Je dis beauté entre guillemets parce que quand tu regardes bien la tête des filles sur les photos, avec leur maquillage pour leur mariage, raouh, tu te dis que c’est relatif au carré la beauté.

En tout cas, tu entres, tu te déshabilles, tu te fais martyriser par la préposée au massage/ gommage/ arrachage de membres de ton corps. Je me demande si ça fait partie de la liste des mauvais traitements de l’ONU le truc ?

Et tu réponds à l’interrogatoire ! Oui oui oui ! Tu es mariée ? Oui / non / avec qui / pourquoi ? Tu travailles ? Oui/ non/ combien tu gagnes ?

Aujourd’hui miracle : la dame est un ange, un vrai. Et elle est belle en plus. Pas comme les vieilles dames avec les seins qui pendouillent, qui ont passé beaucoup trop de temps à faire ce métier.

Et elle me raconte sa vie, sans poser de question. Elle est enroulée dans une fouta rose, qui finit par se défaire. Et là je vois, sur son sein, un tatouage. Le prénom d’un nom.

– Ton amoureux ?

– Oui, mon mari quoi. Je veux l’enlever. Il m’a bien eu. Il m’a dit : viens on le fait tous les deux et on porte chacun le nom de l’autre. Moi je voulais pas.  Et puis je l’ai fait. Et lui n’a jamais tatoué mon nom.

J’ai eu envie de pleurer. Ça m’a rappelé le proverbe tunisien qui dit que la femme est comme une pastèque : sur l’étal choisis celle qui n’a pas été ouverte pour que tout le monde la goûte.

Son mari a fait pareil. Il a écrit son nom sur sa poitrine. Pour qu’elle ne soit qu’à lui. Pour dire aux autres de ne pas goûter la pastèque.

 La Rue

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